La Zone d'Intérêt

La Zone d’Intérêt

US/GB/Pol, J. Glazer, 2024CANNES_H80
Note : 3.5 / 5 – Bien

Le long-métrage de Jonathan Glazer est d’abord remarquable par ses partis pris esthétiques. Beaucoup de prises de vues en caméra fixe, quelques plans-séquences et une image très contrastée : le film est une œuvre d’art à lui tout seul. Mais tous ces artifices visuels finissent par polluer un peu le message que souhaite transmettre le long-métrage. À savoir que l’on peut vivre aux portes de l’enfer, de la manière la plus normale possible, en occultant totalement une réalité alternative à sa porte. C’est autour de cet incroyable fait historique – le chef d’Auschwitz vivait avec sa famille dans un petit pavillon aux portes du camp – que le réalisateur a essayé de proposer quelque chose d’encore jamais vu sur la Shoah. Et, en effet, cette perspective est inédite et suscite donc facilement l’intérêt du spectateur féru d’histoire. Il faut donc trouver le diable dans les détails d’une vie quotidienne décrite dans son apparence sibylline. Il faut alors dénicher chaque ignominie dans des petits riens qui prouvent la triste banalité du mal. Pour nous aider à y voir plus clair, ou plutôt à y entendre plus clair, Jonathan Glazer et ses équipes ont apporté un soin tout particulier à l’habillage sonore de l’environnement de la maison. Le rendu est très réussi, glaçant et perturbant. Mais, comme pour la mise en scène, c’est parfois un peu trop appuyé. Trop d’effets tue l’effet et c’est regrettable. D’autant plus que les deux interprètes de Höss et de sa femme, respectivement Christian Friedel et Sandra Hüller, sont impeccables. Effrayants de normalité, ils incarnent à la perfection ces deux êtres énigmatiques. Vers la fin, quelques séquences stupéfiantes, tournées récemment au mémorial du camp, sont là pour nous rappeler ce que fut la triste réalité.R.M.